C’est vrai, particulièrement chez les hommes, j’ai vu l’appât du gain. Cette volonté rigide, froide, toute puissante de vouloir obtenir des deniers et le plus possible. Cela m’apparait véritablement comme une fuite, une fuite de Soi.
En fait, tous à notre niveau, j’ai beaucoup joué à cela, c’est comme si nous devions justifier notre place. Et notre place se situe un peu en dessous, au-dessus des autres, entre, bref il y a un classement. C’est de là que débute l’imbroglio, de vouloir être, de devoir prouver, justifier son existence au regard des autres, jouer des coudes afin de trouver sa place dans la société, croire qu’en compétition en faisant couler l’autre on gagne du pouvoir. C’est cela, l’esprit de compétition, fratricide, déterminé à gagner, à rugir, à montrer son torse, le porter en avant, fier comme un coq, conquérant pour tout simplement se permettre d’exister.
Il y a bien sûr la confusion argent – pouvoir. Elle est facile à entrevoir dans nos fonctionnements. Ne pas faire de déni de l’argent, ne pas l’apposer en finalité. L’argent sert il n’est pas le dessert.
Lorsque j’étais plus jeune je travaillais dans une société qui proposait des solutions de financement. Très clairement l’appât du gain était fortement prononcé et je crois que c’est la motivation première d’un commercial. Que l’argent motive pourquoi pas mais que le schéma de vente soit quasi consciemment déterminé à tromper le client alors là, il y a un véritable problème. La manipulation règne en maître. Le client signait, puis à travers son contrat, s’il souhaitait à l’échéance allait voir ailleurs nous lui indiquions, à sa grande stupéfaction, le prix de sa liberté. Cette rétention client, ces petites lignes dans le contrat que personne ne lit coûtent cher, des dizaines, des centaines de milliers d’euros aux entreprises qui expérimentent la bassesse de notre monde. Tout pour moi, rien pour l’autre, rien à foutre. Aucunement envie de coopérer tant que je gagne. Je donne rien, je prends tout, je garde tout.
La domination, l’envie de pouvoir, à travers ce chemin-là est illusoire. Du pouvoir sans conscience, ces actes précitées, commun en société, ne nourrissent pas. Ils sont unilatéraux dans leur volonté, des fréquences basses, des retours violents. Et oui, nous récoltons ce que nous semons. Si nous refusons la coopération nous sommes ouverts à nous aussi être manipulés et s’attirer des dominateurs qui vont nous en faire baver.
L’homme dans toute sa splendeur, beaucoup de femmes fonctionnent comme des hommes. Elles sont souvent encore plus misogynes à des postes à responsabilité avec cet esprit de guerrière castratrice au regard de celles qui pourraient leur faire de l’ombre ou limiter leur ascension tout en haut de la tour.
En fait, en écrivant, je me demande pourquoi ? Pourquoi refuser le lien avec l’autre ? Pourquoi refuser le lien avec la vie ? Pourquoi dissimuler ? Pourquoi vouloir gagner ? Pourquoi ne pas se reconnaître comme nous sommes et ainsi chercher autre chose ? Je crois tout simplement qu’il y a profondément cette volonté de prouver. Depuis que nous sommes petits, il y a les bons, les moins bons, l’entre deux, et les mauvais. Il y a un classement. Et nous désirons tous faire partis de l’élite. La méritocratie portée en étendard, gagner signifie monter mais à quel coût humain ? En montant sur qui ? En s’appuyant passablement sur quelles épaules ?
Par peur de ne pas être reconnu, par peur de ne pas être en vue, par peur de ne pas justifier son existence, l’Humain tente de faire sa place. L’humain du XXIème siècle se prête toujours au jeu du combat, être valeureux, gagner, aller de l’avant, montrer à l’autre qui est le plus fort et ainsi atteindre la grâce de ses pères : cette fameuse promotion dont j’ai tant rêvé ! Triste monde.
Je suis formé, structuré puissamment comme une personne élitiste, compétitive devant prouver chaque jour ma valeur aux yeux du monde. Et c’est un sacré chemin afin de créer de vrais liens. Une expérience collective en cours, désapprendre pour être ensemble.
Nous sommes tellement habitués aux jeux de pouvoir continuels qu’une relation saine paraît anormale ou dérangeante. De nouveaux liens arrivent, plus coopératifs, et cela va prendre du temps. Nous découvrons que l’autre peut nous être « utile ». Nous découvrons que l’autre peut nous nourrir. Nous découvrons même qu’en nourrissant l’autre nous sommes nourris. Nous découvrons que nous pouvons lâcher les armes sans que le monde nous agresse. Nous découvrons notre liberté, celle d’aimer et avant tout de s’aimer. Un cheminement incroyable pour des écoliers habitués à être bons ou mauvais. À être en classe prépa, l’élite, ou simplement sans diplôme, une humanité en dehors des classements, en dehors des cases, en acceptant l’autre, son individualité tout en découvrant la nôtre. Un chemin, une histoire, un apprentissage en cours.